Une station thermal en Toscane d’Auvergne ?

À la fin du XIXe siècle, un ambitieux projet aurait pu transformer radicalement les communes de la Toscane Auvergnate situées en bordure de l’Allier. Un certain M. Hannezo, comptable parisien, rêvait d’ériger une station thermale d’envergure aux Martres-de-Veyre, profitant des nombreuses sources minérales du secteur. Retour sur cette aventure qui, malgré des débuts prometteurs, s’est terminée en désillusion.

Des eaux réputées depuis des siècles

Les sources des Martres-de-Veyre étaient connues depuis l’Antiquité et mentionnées dans plusieurs écrits dès le XVIIe siècle. Médecins et scientifiques en vantaient les bienfaits, notamment pour le traitement des affections du foie, de la goutte ou encore du diabète. Le docteur Chomel, médecin du roi, affirmait même que Colbert et Mazarin leur devaient leur guérison. Riches en bicarbonate, sel et gaz carbonique, ces eaux attiraient l’attention des experts… et des investisseurs.

C’est ainsi qu’en novembre 1897, M. Hannezo adresse une lettre à la mairie des Martres-de-Veyre pour acquérir des terrains communaux en vue de créer une station thermale. Séduite par cette perspective de développement économique, la municipalité donne son feu vert. Un bail de 99 ans est signé en décembre 1898.

Un projet pharaonique

L’investissement prévu est colossal : 1 million de francs pour construire un établissement thermal, un hôtel de luxe, un parc aménagé et même un canal navigable. Mais l’ambition ne s’arrête pas là ! En 1899, l’ingénieur Marchal imagine un vélodrome, un hippodrome et un funiculaire permettant de rejoindre le sommet du puy Saint-Romain.

La région voit d’un bon œil ce projet qui pourrait dynamiser l’économie locale, déjà fragilisée par la crise du phylloxéra ayant ravagé les vignobles. La perspective d’une station thermale associée aux célèbres vins d’Auvergne séduit les élus. Mieux encore, un projet de tramway départemental pourrait relier directement la station à Clermont aux communes voisines.

De l’espoir…aux premiers impayés

Cependant, dès 1901, les premières difficultés apparaissent. M. Hannezo peine à honorer ses engagements financiers. En 1902, la mairie engage des poursuites pour récupérer des loyers impayés. L’absence de constructions concrètes nourrit les doutes.

Face aux retards accumulés, l’enthousiasme initial s’émousse. En 1905, la situation s’enlise. Pourtant, un nouvel espoir surgit avec la création de la Société des Eaux Minérales et Thermales des Martres-de-Veyre et de Corent. Son objectif : lever des fonds pour relancer le projet. La station est alors présentée comme un futur pôle d’attraction pour les nombreux touristes venant découvrir le Puy-de-Dôme.

Mais, le destin en décide autrement. En 1907, M. Hannezo décède, et avec lui, le rêve d’une station thermale s’éteint. Deux ans plus tard, sa fille demande officiellement la résiliation du bail.

Un vestige oublié

Aujourd’hui, il ne reste que des souvenirs de ce projet avorté. Certains vestiges, comme les sources bouillonnantes du Grand Saladis et de Sainte-Marguerite, témoignent de l’incroyable richesse géologique de la région.

Ce rendez-vous manqué avec l’histoire nous rappelle que la Toscane d’Auvergne aurait pu voir naître une station thermale aussi renommée que celles de Vichy ou du Mont-Dore. Mais, le vent du destin a soufflé autrement, laissant place à une belle utopie inachevée.